Près de la jolie petite ville de Saint-Amand, si connue par sa célèbre Abbaye, dans une prairie humide ombragée par une belle forêt se trouvent des eaux et des boues minérales. Tout fait croire qu’elles furent connues dans l’antiquité, car on a trouvé dans les environs des médailles et des restes de constructions romaines, ainsi qu’un grand nombre de statues en bois de 3 à 4 mètres de hauteur, que l’on retira en déblayant la source.
Quoi qu’il en soit, il y a deux siècles, on ne connaissait en ce lieu qu’une seule fontaine nommée le Bouillon. Après la bataille de Lens, en 1648, l’archiduc Léopold, gouverneur des Pays-Bas, y fut amené par son médecin. Ce prince, disent les auteurs contemporains, attaqué de coliques néphrétiques et de gravier, fut parfaitement guéri par l’usage de ces eaux.
Ce ne fut cependant qu’en 1697 que, par les ordres de Louis XIV, le maréchal De Boufflers y établit des constructions durables. Outre la fontaine principale, il y en a une autre qui fut couverte d’un pavillon. L’édifice s’étant écroulé vingt ans après, elle conserva le nom du Pavillon ruiné. Une troisième fut nommée Fontaine d’Arras, parce que l’évêque de cette ville y recouvra la santé.
Pendant que les mineurs du roi étaient employés à ces travaux, ils furent commandés pour le siège d’Ath; après la prise de cette ville, ces mineurs revinrent à la fontaine; beaucoup d’entre eux avaient les jambes couvertes d’ulcères, qui disparurent en peu de temps par le contact de la vase dans laquelle ils travaillaient. C’est ce qui donna l’idée d’établir dans ce lieu des bains divisés à la superficie du sol par des châssis de bois; c’étaient dans ces compartiments que les malades s’enfonçaient jusqu’aux épaules, n’ayant que le ciel pour abri, et ce ne fut qu’en 1765 qu’une serre vitrée vint couvrir les baigneurs et les préserver de l’intempérie des saisons.
Les chimistes se sont souvent occupés de la composition de ces eaux, qui sortent de la terre à une température de 19.5° centigrade en exhalant une odeur d’hydrogène sulfuré, et feu Monsieur Armet, médecin très connu à Valenciennes, chargé longtemps du service de cet établissement, a constaté, par une longue pratique, leur vertu pour la guérison des affections rhumatismales, ainsi que pour la paralysie.
En 1804, Pierre Mourey, lieutenant du 55ème régiment d’infanterie, à la suite d’une blessure reçue au blocus de Maubeuge, portait un pied à 20 centimètres de terre; après avoir employé sans succès les remèdes que l’art indique en pareil cas, il vint aux Eaux et après avoir pris 3 bains, 33 douches et 33 boues, il fut radicalement guéri. Il laissa ses béquilles à l’établissement et rejoignit son corps. Le prince Louis Bonaparte, qui fut roi de Hollande, vint pendant une année habiter la fontaine. Son séjour y amena beaucoup d’étrangers attirés par les fêtes qui signalèrent sa présence.
Cet établissement, si utile dans le Nord de la France, eut beaucoup à souffrir pendant la Révolution; les bâtiments tombaient en ruines et les malades n’y trouvaient plus le confortable nécessaire à leur position. C’est ce qui engagea le Conseil-général du département à voter des fonds pour sa restauration complète. Les travaux commencèrent en 1840, d’après les plans et sous la direction de Monsieur Mallet, architecte à Douai. L’ignoble hangar fit place à une élégante rotonde et offrit à chaque baigneur un cabinet particulier au sortir des boues. Une arcade joint ce dôme vitré à un bâtiment d’apparence modeste, mais disposé intérieurement avec beaucoup de talent; il renferme des logements pour les baigneurs, des cabinets pour les bains d’eau pure et les douches, des salles de jeu et de vastes salons d’où l’on découvre la forêt et les belles charmilles plantées sous Louis XIV. Ces sombres allées protègent de leur ombre séculaire les nombreux visiteurs qui viennent y chercher, les uns la santé, les autres le plaisir.
Chaque année, à l’ouverture de la saison, un bal attire en ce lieu la belle société des villes voisines; on y danse sous les frais bocages éclairés par mille feux colorés et au son d’un excellent orchestre.
Monsieur BENEZECH de SAINT HONORE.
Vers l’an 638, saint Amand vint fonder un monastère entre la Scarpe et la petite rivière d’Elnon, sur un terrain qui lui avait été donné par Dagobert, roi de France. Cette abbaye fut plusieurs fois détruite pendant les guerres sanglantes dont nos contrées furent le théâtre; 200 ans après sa fondation, les Normands vinrent la saccager et égorgèrent les moines qui s’y trouvaient. Elle fut rebâtie entièrement en 1662 par Nicolas Dubois, alors abbé. La magnificence de ce monument frappait d’admiration les voyageurs, et on le regardait comme une des merveilles du pays.
La tour de l’abbaye, seul reste de tant de gloire, a 81 mètres 56 centimètres de hauteur; elle est construite en pierres blanches, à l’exception des assises inférieures qui sont en grès : ses parements sont décorés de scultures, d’inscriptions, d’enroulements et d’ornements si bien combinés avec les conditions de solidité, qu’ils dénotent l’oeuvre d’un homme de génie qui a su s’écarter de la routine de son siècle.
du haut de la tour on découvre une vaste étendue de pays; on suit la scarpe, réduite actuellement à couler dans les redressements que l’on a fait à son cours, mais dont l’aspect était bien plus pittoresque lorsqu’elle déroulait lentement ses eaux, en enlaçant mille fois les vastes prairies que son limon venait féconder.
Ce monument réclame des travaux d’entretien et de consolidation : en abattant la nef de l’église, on l’a privé d’un appui sur lequel l’architecte avait sans doute compté, dans ses savantes combinaisons, pour la solidité de son oeuvre. Une lézarde s’est déclarée, et la masse paraît pencher du côté où l’église lui servait naguères de contrefort; des fragments de pierres se détachent, d’ailleurs du haut de l’édifice.
L’abbaye de Saint-Amand vit mourir, en 1536, Jean Second, auteur des BAISERS et surnommé le Tibulle moderne; son tombeau, qui occupait une place distinguée dans l’église, fut détruit en 1586 par les hérétiques, et rétabli peu après. Les restes du poète batave furent définitivement jetés au vent pendant la tourmente de 93.
BENEZECH de SAINT HONORE.
Au VIIème siècle, SAINT-AMAND n’était qu’un village, connu sous le nom d’ELNON. En 634, le Roi DAGOBERT donna cette terre et le village a un religieux nommé AMAND. Celui-ci y fonda une abbaye qui prit son nom.
Ce monastère fut brûlé par les Vikings (Normands) en l’an 880.
En 1340, le comte du Hainaut s’empara de la ville, ainsi que de l’abbaye, y mit le feu et en massacra tous les habitants pour se venger des bourgeois et de la garnison qui avaient dévasté HASNON.
En 1477, les mêmes faits se reproduisent. Les troupes de la duchesse de Bourgogne lui firent subir les mêmes malheurs.
En 1521, le prince de Ligue met siège et prend la ville.
En 1667, les Français s’en rendirent maîtres et la dévastèrent entièrement.
On voit encore de nos jours dans cette ville, le clocher de l’ancienne abbaye, bâti de 1633 à 1636; c’est tout ce qui reste du plus beau monument gothique de toute la région. Il est construit en grès et pierres blanches, sculptées de la base au sommet, cette tour qui sert aujourd’hui d’horloge publique domine toute la contrée.
On arrive au sommet par un escalier de 450 marches.
le joyau de cet ensemble de constructions, distribué sur un carré de 180 mètres de côté était évidemment l’Église abbatiale. Avec ses 120 mètres de long, son double transept, son choeur surélevé, auquel on accédait par quarante trois degrés, sa tour portail de 80 mètres, sans parler de la richesse de la décoration intérieure, à laquelle contribua RUBENS, cette blanche cathédrale dominait la région comme le symbole même de l’autorité de l’abbaye et de la puissance d’une tradition. Tout cela a péri dans les années qui suivirent la révolution, à l’exception de la tour sauvée par sa masse même.
Elle continue à suggérer avec force le rôle spirituel et temporel des abbés de SaintAmand.
Avant que Condé n’appartint à la France, toutes les affaires de la ville étaient dirigées par le bailli, le mayeur et les jurés, avec le concours des habitants. A cet effet, on tenait deux fois l’an, et dans les besions pressants, des assemblées à la maison de la ville. Elles étaient annoncées au peuple par trois coups de la grosse cloche et la majeure partie des habitants s’y rendait.
Les logements de troupes, les impôts et les contributions de guerre, dont fut toujours accablé le pays, ne rendirent ces assemblées que trop fréquentes.
Le 26 mai 1773, le plan de l’hôtel-de-ville de Condé fut soumis au maréchal de Croy par Dubuat, le célèbre auteur des « principes d’hydraulique et de pyrodynamique », alors officier du génie de Condé. Le maréchal rencontra de grands obstacles pour son emplacement et pour l’obtention des fonds nécessaires à sa construction; mais il les surmonta avec cette activité dont il donna tant de preuves dans nos contrées en diverses occasions.
Le 6 juin de l’année suivante, il posa la première pierre de ce bâtiment qui ne fut achevé que quelques années plus tard.
Cet édifice, bâti en pierres bleues et dont les colonnes sont de l’ordre dorique, quoique paraissant un peu lourd, fait un bel effet sur la place de Condé et, est considéré comme un beau morceau d’architecture. Les bals qui ont lieu dans une des salles de l’hôtel-de-ville sont en réputation.
BENEZECH de SAINT HONORE.
La ville de Tournai, ce berceau de la monarchie française, renferme une foule de monuments anciens, pour la plupart gothiques, que le temps a respectés. C’est qu’ils ont été construits avec la pierre bleue que l’on extrait dans les environs. Les intempéries ont bien, à la longue, un effet corrosif sur quelques blocs qui s’exfolient; mais le remplacement en est facile, puisque les autres résistent. Aussi, tandis qu’à Valenciennes la base du beffroi s’écrase sous son fardeau, à Tournai des réparations du même genre se poursuivent sans encombre, et la cathédrale, ce magnifique monument d’architecture romane, permettait des travaux d’une hardiesse étonnante.
Le mot BEFFROI, que l’on écrivait autrefois BELFROID, dérive, selon Ducange, de BELL, cloche, et de FREID, paix. Chaque ville de la Belgique et du Nord de la France possédait un beffroi. C’est du haut de ces tours que les cloches de la cité appelaient le peuple dans les rassemblements où l’on réglait les affaires de la ville. Le mot BEFFROI, d’après Monsieur Arthur Dinaux, indique son origine et son usage; il remonte aux « Paix, ou chartes municipales concédées par des souverains aux principales communes de la Flandre ». L’origine du beffroi de Tournai, situé sur la grande place, remontait à une époque très reculée. Il fut détruit par un incendie dans la nuit du 13 au 14 février 1391. Le feu fut si violent, dit un historien, que les cloches se fondirent sous les débris des matériaux enflammés qui s’écroulèrent avec elles au fond de la tour. Heureusement, la nuit étant calme, les maisons voisines ne reçurent pas de dommage. Il fut rebâti aussitôt sur ses anciens fondements et sur le même plan, avec cette différence que la partie supérieure qui était une plate-forme couverte de plomb portant un pavillon à l’un des coins, pour le guet, fut surhaussée d’un clocher à flèche dont la girouette était un dragon ailé de six pieds de diamètre.
ce monument, bâti en pierres du pays, domine la place de Tournai. Le badigeon l’ayant respecté, il est d’un aspect sévère, comme les sombres édifices gothiques que l’on rencontre à chaque pas dans cette antique cité, qui, dit-on, vit naître Clovis.
BENEZECH de SAINT HONORE.